Mémoire – Comité permanent des finances de la Chambre des communes

Consultations pré-budgétaires de 2011-2012

Présenté le 12 août 2011 par :

Initiative boréale canadienne (IBC)

402 – 30 rue Metcalfe 

Ottawa, ON K1P 5L4  

Tél. : 519-498-9486

 


RÉSUMÉ :

Initiative boréale canadienne (IBC)

Nous aimerions tout d’abord expliquer brièvement qui nous sommes et l’importance de la région boréale canadienne. L’Initiative boréale canadienne (IBC) se fonde sur le Cadre boréal – une vision qui a le soutien des principales sociétés exploitantes de ressources, des Premières nations et de groupes de conservation. Nos objectifs consistent à appuyer la protection d’au moins 50 % de la région boréale canadienne et à promouvoir des pratiques durables de renommée mondiale sur l’assise territoriale restante, le tout selon des modalités qui respectent et appuient les droits des autochtones. 

Nous nous attaquons à des enjeux bien réels. Nos sociétés exploitantes partenaires possèdent plus de 50 millions d’acres ayant fait l’objet d’une certification du Forest Stewardship Council (FSC) – une superficie environ quatre fois celle de la Nouvelle-Écosse. Le Canada est prêt à agir comme chef de file mondial en matière de foresterie durable. Plusieurs de nos Premières nations partenaires mettent de l’avant des plans d’occupation du sol qui assurent un équilibre entre la protection et les possibilités de mise en valeur durable des ressources. Nous travaillons également avec des groupes environnementaux en vue de sensibiliser l’opinion à la conservation et aux possibilités de mise en valeur durable. Nous conseillons les autorités provinciales et territoriales et les Premières nations et nous collaborons avec elles concernant tout un éventail d’initiatives.   

La région boréale canadienne

Aujourd’hui, il n’y a que trois pays dans le monde qui possèdent encore de vastes étendues de forêts intactes : le Brésil, la Russie et le Canada. De ces trois pays, le Canada est manifestement celui qui est le mieux placé pour élaborer un modèle de viabilité susceptible d’inspirer le reste du monde. Il s’agit là d’une des plus grandes possibilités de notre époque.

Notre région boréale, d’une superficie de 1,4 milliard d’acres, constitue 58 % de notre masse terrestre. Elle s’étend de Terre-Neuve et Labrador au Yukon<[1] . Son avenir revêt une grande importance pour l’ensemble du Canada et pour les quelque 500 collectivités autochtones qui y vivent en permanence [2] .

Notre région boréale est un moteur économique pour notre économie et pour les communautés du Nord. Plusieurs de ces communautés veulent en outre équilibrer le développement et la protection de leur territoire. Pour assurer la prospérité économique générale, la vitalité culturelle et l’intégrité écologique du Canada, il faut planifier la viabilité de la région boréale.

Les écosystèmes boréaux fournissent une grande variété d’écoservices précieux. Selon une étude de l’IBC et du Pembina Institute, la valeur totale non marchande des écoservices boréaux est de 93,2 milliards de dollars par année[3] . Les valeurs les plus élevées incluent le filtrage de l’eau, la régulation des inondations, la séquestration et le stockage du carbone et la lutte contre les ravageurs. Bien que ces données soient préliminaires, nous avons estimé que les forêts boréales et les tourbières du Canada recèlent 67 milliards de tonnes de carbone et que leur valeur est d’environ 3 700 milliards de dollars[4]

Les parlementaires sont généralement favorables à la création de nouvelles zones protégées de grande ampleur, y compris quelques nouveaux parcs nationaux annoncés par l’actuel gouvernement en vue de protéger la faune et les autres atouts écologiques que l’on y trouve. Il y a des zones de la région boréale où le besoin de protection est particulièrement important. Par exemple, le caribou des bois est très sensible aux perturbations, de sorte que les effectifs de caribous boréaux des bois diminuent partout au pays, et notamment dans les régions à industrialisation rapide, comme l’Alberta. Des zones clés doivent être protégées pour conserver l’habitat de la faune et les modes traditionnels de vie; en même temps, il faut travailler avec l’industrie, les communautés, les autorités gouvernementales et d’autres groupes sur les mesures de protection susceptibles d’être adoptées dans

RECOMMANDATIONS :

(1) Appuyer l’écologisation du secteur forestier canadien : 

Le caractère changeant des réalités économiques, la sensibilité plus grande de l’opinion publique et les craintes concernant l’environnement suscitent aussi bien des problèmes que des possibilités pour l’industrie forestière et les organisations environnementales canadiennes. Ces défis ont incité 21 sociétés canadiennes de produits forestiers et neuf organisations environnementales de première ligne à conclure une entente sans précédent. Lancé en mai 2010 sous le vocable Entente sur la Forêt boréale canadienne (EFBC), cet accord s’applique à 76 millions d’hectares de forêt s’étendant de la Colombie-Britannique à Terre-Neuve, sa superficie étant plus grande que celle de l’Alberta.  

L’EFBC repose sur deux idées relativement simples. Premièrement, il faut conserver aussi bien la forêt boréale que les emplois qui y sont liés et éviter de choisir entre les deux à cause des circonstances. Deuxièmement, les promoteurs de la conservation et les entreprises devraient travailler ensemble en vue de proposer des solutions et de conseiller les autorités provinciales et fédérales, les Premières nations et les autres administrations publiques sur la façon de réaliser ces objectifs.

L’entente reconnaît également de manière explicite que les autochtones ont des droits et des titres conférés par traité qui sont constitutionnellement protégés, de même que des intérêts et des aspirations légitimes. Sans porter atteinte à ces droits et à ces titres, l’EFBC doit s’y conformer. Les sociétés et les organisations environnementales participantes croient que la conservation des forêts et la compétitivité des entreprises exigent une participation équitable et sans restrictions des peuples autochtones et de leurs autorités gouvernementales.

Notre défi commun consiste à répondre à des impératifs sociaux, économiques et environnementaux qui sont parfois en conflit les uns avec les autres et à le faire d’une manière qui permette d’exploiter les nouvelles possibilités économiques concernant les produits forestiers satisfaisant aux normes environnementales les plus élevées. En vertu de l’Entente sur la Forêt boréale canadienne, les environnementalistes et l’industrie se sont engagés à travailler ensemble dans le contexte du marché et sur le terrain en vue d’appuyer les gouvernements et les communautés à créer une industrie forestière plus forte et plus concurrentielle, ainsi qu’une forêt boréale mieux protégée et gérée de manière plus durable. 

L’EFBC n’a pas tardé à produire des fruits. Grâce à elle, on a procédé à l’interruption volontaire de l’exploitation forestière sur près de 29 millions d’hectares servant d’habitat au caribou des bois et faisant partie des zones contrôlées par les membres de l’APFC, et ce, afin de permettre une planification intensive tout en maintenant l’approvisionnement de bois nécessaire au fonctionnement ininterrompu des usines de pâte et papier. Une autre réalisation importante a été l’interruption par les organisations environnementales d’opérations de retranchement et de campagnes « de refus d’acheter » ciblant les produits des sociétés participant à l’EFBC.

L’entente constitue une feuille de route de trois ans et comporte des mécanismes permettant sa reconduction. Toutes les parties appuyant cette entente se sont engagées à participer pleinement à cette initiative sans précédent et travaillent en concertation en vue de trouver des solutions à long terme dont elles feront la promotion au pays et à l’étranger.  

L’EFBC est entrée en vigueur il y a un peu plus d’un an. Maintenant que la lune de miel a pris fin, on assiste à la mise en place des étapes qui seront nécessaires pour assurer le succès du mariage. Les premières nations et les gouvernements sont invités à proposer des orientations et à témoigner de leur appui. Les mesures commerciales et de conservation convenues au départ continuent de s’appliquer. Et l’on s’emploie à concevoir des idées et des projets qui se traduiront par des solutions avantageuses tant du point de vue des emplois que de l’environnement. 

Pour appuyer ce travail, les signataires de l’EFBC ont mis sur pied un secrétariat responsable de la coordination des groupes de travail nationaux et régionaux, créé un groupe scientifique consultatif indépendant et intensifié les rapports avec les Premières nations, les gouvernements provinciaux et municipaux et les intervenants concernés. D’importants clients internationaux de l’industrie des produits de la forêt boréale représentant un chiffre d’affaires de plus de 140 milliards de dollars ont avalisé l’entente dans le cadre du nouveau Forum boréal des entreprises (Boreal Business Forum). D’autre part, le cabinet de vérificateurs KPMG a terminé la première évaluation indépendante des progrès accomplis au titre de l’entente. Des groupes de travail régionaux s’emploient activement à planifier la conservation dans plusieurs domaines de compétences. 

Toutefois, il est également clair qu’il faudra des ressources supplémentaires pour réaliser nos objectifs :

Nous recommandons que le Comité appuie les investissements dans un secteur forestier durable de renommée mondiale au Canada grâce à un appui édéral :

(a)   aux établissements et aux capacités de développement autochtones en vue de permettre un leadership et une participation des Premières nations dans ce secteur aux échelons national et régional;

(b)   à la poursuite des objectifs de l’EFBC par le biais d’investissements dans le secrétariat de l'EFBC.

Les sources de financement pourraient inclure Ressources naturelles Canada, Environnement Canada ou Affaires autochtones et Développement du Nord Canada. 

(2) Rétablir l’aide fédérale en matière d’aménagement  :

Comme nous l’avons observé dans plusieurs régions du pays, lorsque des régions du Nord sont ouvertes à l’industrie sans planification et sans consultations préalables avec les communautés autochtones et locales en vue d’assurer un équilibre entre conservation et développement, des conflits surgissent.   

L’IBC et nos partenaires préconisent le recours à l’aménagement régional du territoire comme outil de gestion des conflits relatifs à l’utilisation et à la mise en valeur d’un territoire. Selon notre expérience, les situations où les peuples autochtones, en concertation avec les autres gouvernements et intervenants locaux, font preuve de leadership en mettant en œuvre des plans d’occupation du sol produisent les meilleurs résultats du point de vue de la protection des valeurs écologiques et culturelles et assurent une certitude plus grande concernant les investissements et la mise en valeur durable des ressources. 

Près de 60 % de la région boréale fait l’objet d’un aménagement réel ou projeté du territoire[5] . Toutefois, plusieurs de ces processus sont assujettis à des retards parce que la planification exhaustive du territoire exige des ressources financières importantes. L’Ontario, le Québec, le Manitoba et d’autres territoires de compétences ont pris des engagements importants en matière d’aménagement du territoire, mais éprouvent des difficultés à trouver les ressources nécessaires pour les honorer. Aussi bien les Premières nations que les provinces nous disent que le gouvernement fédéral fournissait un plus grand soutien dans le passé pour la planification à l’échelle des communautés et que cette planification ne bénéficie pas actuellement d’un financement adéquat. À notre avis, il importe que le gouvernement fédéral reprenne son rôle en tant que partenaire dans cet important domaine.     

Nous recommandons que le Comité appuie un accroissement sensible du financement fédéral pour la planification régionale du territoire en collaboration avec les provinces, les territoires et les peuples

À l’heure actuelle, une bonne part du financement fédéral au titre de l’aménagement du territoire affecté aux peuples autochtones ne concerne que la planification sur les réserves. On devrait envisager la possibilité d’appuyer des initiatives de planification s’appliquant aux terres traditionnelles autres que les réserves. À cette fin, on pourrait, par exemple, envisager un élargissement du mandat de l’enveloppe de la Planification communautaire globale (PCG) au sein d’Affaires des autochtones et du Développement du Nord

MOT DE LA FIN :

Le moment est venu d’adopter de nouvelles approches qui protègent l’écosystème boréal et les cultures boréales et qui renforcent la position du Canada sur la scène internationale en tant que pays nordique. Nous pouvons créer des économies durables tout en conférant un avantage concurrentiel mondial aux entreprises et aux communautés canadiennes. 

La région boréale canadienne nous donne la possibilité de penser autrement, de nous concerter autrement et de faire des affaires autrement. L’Initiative boréale canadienne est déterminée à œuvrer en ce sens.  



[1] Lee, Peter, Dmitry Aksenov, Lars Laestadius, Ruth Nogueron, et Wynet Smith, Canada’s Large Intact Forest Landscapes, (Edmonton : Global Forest Watch Canada, 2003), p. 40-41.

[2] Canadian Boreal Initiative. The Boreal in Balance : Securing the Future of Canada’s Boreal Region, (Ottawa : Canadian Boreal Initiative, 2005), p. 1.

[3] Anielski, M., et Wilson. S. 2005. Counting Canada’s Natural Capital : Assessing the Real Value of Canada’s Boreal Ecosystems,

[4] Ibid. Donnée préliminaire reposant sur les coûts du risque d’assurance.

[5] Canadian Boreal Initiative. The Boreal in Balance : Securing the Future of Canada’s Boreal Region, (Ottawa : Canadian Boreal Initiative, 2005), p. 2.